Itinéraire original autour des 3000 surplombant les Bains de Panticosa qui pourrait soulever une question existentielle : pourquoi aller aux picos de Bachimana alors que les pics d’Enfer étaient plus proches, plus faciles et tellement beaux ? Peut-être l’envie d’une tranquilité absolue !
Date : 2020/08/21
Distance totale Distance et dénivelé indicatifs. Privilégier ces valeurs plutôt que celles indiquées le profil. : 19 km
Dénivelé positif : 2100 m
Temps de montée Pauses classiques incluses (photo, discussion, collation, manips à ski...) au contraire des longues interruptions (sommet, refuge, sieste...) : 2h jusqu’au Garmo Negro + 1h30 de plus jusqu’au pico Pondiellos + 1h30 jusqu’au dernier point sur la crête de Bachimana
Temps de descente : 2h30
Conditions et commentaires : beau avec un peu de vent.
Difficultés : hors-sentier pénible, pentes raides, portions découpées (II+ max.).
Accès : bains de Panticosa
Itinéraire Profil visible en cliquant en bas à gauche de la carte. Privilégier les valeurs ci-dessus plutôt que celles indiquées sur le profil. : GPX
Lucille est en passe de terminer les 3000 principaux. Je l’accompagne à Panticosa dans l’optique de visiter les sommets confidentiels autour des 3000. Le site des Bains de Panticosa est un lieu étonnant dont j’aimerais connaître l’histoire. En arrivant, il y a d’abord comme un parking en silos désaffecté proposé comme un lugubre espace pour les campings-cars puis une retenue d’eau. Au centre de trouve les thermes : un bâtiment récent composé de bains et d’hôtels entourés de centaines de places de parking. En journée et surtout en prenant un peu de hauteur, on se rend vite compte du nombre de bâtiments désaffectés qui entourent l’ensemble. Quel gâchis. De nombreux vans sont présents : discussion à propos de l’itinéraire du lendemain, préparation du repas, rangement des sacs, tout le monde s’affaire. Nous décollons un peu après 7h. C’est un horaire qui sonne bien pour un départ matinal et nous avons presque l’impression d’être dans un magasin parisien à l’ouverture des soldes au moment où les vigils viennent de lever le rideau de fer. Nous nous retrouvons seuls sous le col de Pondiellos et poursuivons sur la sente cairnée jusqu’au collado Argualas (sur certaines cartes seulement) où Lucille s’en va vers le pico de Argualas tandis que je file vers le Garmo Negro. Magnifique panorama : quelle vue sur les pics d’Enfer poinconnés de cette dalle calcaire. Les lacs de Pondiellos avec le Balaïtous ne sont pas en reste non plus.
Pour rejoindre l’aiguille de Pondiellos, la descente sous le Garmo Negro jusqu’à la brèche demande un peu d’attention dans un terrain pas terrible. Passée l’aiguille, c’est ensuite un peu plus facile et un couloir évident dépose au col de Pondiellos (2812 m). Le détour que j’ai réalisé pour aller au Garmo de Albas (2749 m) n’a que peu d’intérêt sauf pour déambuler autour des lacs de Pondiellos. Sous le col, je longe le grand étang par la gauche. Un nombre incroyable de moucherons virevoltent et m’interdisent d’ouvrir la bouche. Je monte à un premier sommet (2823 m) puis redescend un peu et longe facilement jusqu’au sommet convoité où je constate qu’il va bien falloir parcourir tout dans l’autre sens. Pour éviter la monotonie, je contourne les lacs par la rive droite et rejoins directement le collado Saretas (2831 m) puis le pico Pondiellos (2911 m) tout proche, qui nécessite de poser les mains à la toute fin, plusieurs passages possibles. Vue limitée car bloquée au S par le Garmo Negro et au N par les pics d’Enfer. J’observe Lucille qui descend vers le col de Pondiellos puis nous nous retrouvons au col. Son parcours s’est bien passé.
Nous nous séparons à nouveau, elle s’en va pour les pics d’Enfer, si envoûtants. Presque tenté, je pars plutôt dans l’inconnu avec l’objectif de rejoindre les picos de Bachimana, tout du moins le plus haut des trois. Du col, le sommet culminant des picos de Bachimana est bien visible puisqu’il se situe sur la crête E du pico de los Arnales. Je vise le point bas de la crête en traversant un terrain rocheux avec quelques cairns qui s’estompent, descendant sans doute ensuite vers l’ibon de los Arnales. Une centaine de mètres sous la brèche, je découvre qu’elle est verticale et qu’une corde fixe y pendouille non-chalamment. Bof… En posant un peu les mains, je monte sans encombre sur la crête O du pico de Bachimana qui semble difficile. En basculant de l’autre côté, je monte au sommet au milieu des blocs et dalles avec quelques pas de II. Ai-je pris au plus facile ? Un modeste cairn coiffe le sommet et j’y découvre ses deux petits frères, deux modestes pointes séparées par une crête découpée. D’ici, le deuxième sommet semble accessible, je rejoins le collet les séparant puis m’engage sur la crête : II/II+ partiellement évitable à flanc voire totalement évitable puisque je descends par une cheminée sous le sommet.
Sans trop d’illusions, je tente rapidement ma chance vers la troisième pointe en longeant un chaos rocheux sous la crête. La pointe semble inaccessible, Lucille va m’attendre si je tarde trop. Je rejoins tout de même une éminence sur la crête pour voir si je peux ensuite la suivre jusqu’au troisième sommet. Verdict : peut-être pas impossible en crapahutant mais assurément pas roulant. J’opte pour la sagesse et rejoins l’ibon Azul Inferior au plus direct en zigzaguant entre les barres à la fin où je commençais presque à douter sur l’existence d’un passage facile. Bon timing puis nous nous retrouvons pile en même temps avec Lucille à l’ibon Azul Superior. Belle descente fréquentée jusqu’au refuge puis bondée en-dessous. C’est dommage car la fin est somptueuse avec un torrent criblé de magnifiques vasques. Heureusement, criblé, le chemin en était de framboises.
La dalle des pics d’Enfer est en marbre, pas en calcaire ! Elle a d’ailleurs failli être exploitée.
Sinon les bains ont une vielle histoire mais c’est au 19ème siècle qu’on a commencé à construire des bâtiments qui ont accueilli la belle société de l’époque dont le roi Alphonse XIII. Le principal hôtel a notamment un ascenseur tout en bois assez extraordinaire, il y avait un casino etc….. Le site a perdu de son importance au XXème siècle et a périclité (ce qui m’a permis de profiter de ces hôtels dans les années 1990 !). En 2000 le site a été cédé à un grand groupe qui devait le réhabiliter entièrement et en faire une sorte de resort de luxe. Ceci explique entre autres la création du refuge de Bachimana afin que les touristes/randonneurs ne résident plus au refuge de Casa de Piedra (et aussi la variante du GR11 pour aller directement du refuge de Bachimana au col de Brazato sans passer par los Banos). La crise immobilière de 2008 et les années suivantes a stoppé le projet et du coup tout est arrêté alors que certains immeubles ont été réhabilités et pas d’autres.
Très intéressant, je comprends mieux. Je lirais bien des pages et des pages sur l’histoire de ces lieux plus ou moins connus depuis lesquels on part, parfois comme si de rien n’était : l’hospice de France, de Rioumajou, Panticosa, Astau etc etc.
En tout cas, au-dessus de Panticosa, il reste une flopée de sommets à visiter, ça promet d’autres visites.