Du calme sur les crêtes sauvages espagnoles à la foule dimanche avec le passage de la Skyrace au sommet de la Coma Pedrosa : un périple inspirant ponctué de rencontres, de surprises et qui a la particularité de passer dans les 3 pays pyrénéens.
Date : 28 et 29/07/2018
Distance totale Distance et dénivelé indicatifs. Privilégier ces valeurs plutôt que celles indiquées le profil. : 17,5 + 13 km
Dénivelé positif : 2700 m
Temps de parcours Pauses classiques incluses (photo, discussion, collation, manips à ski...) au contraire des longues interruptions (sommet, refuge, sieste...) : J1 : 7h45 – J2 : 5h30
Conditions et commentaires : beau.
Difficultés : des parties hors-sentier, raides et un peu aériennes.
Accès : étang de Soulcem
Itinéraire Profil visible en cliquant en bas à gauche de la carte. Privilégier les valeurs ci-dessus plutôt que celles indiquées sur le profil. : GPX
Jour 1
L’idée de ce périple m’est venue lorsque j’ai réalisé que la Skyrace de la Coma Pedrosa avait lieu dans quelques jours : une partie de l’élite mondiale du trail doit passer au sommet du célèbre sommet andorran ainsi que deux amis du Couserans. Ce fut un excellent prétexte pour imaginer un itinéraire permettant de visiter quelques sommets et de faire un joli bivouac pas trop loin de la Coma Pedrosa. Pierre V., couserannais, montagnard et photographe a prévu de dormir au sommet, nous pourrons donc attendre les coureurs ensemble.
De l’étang de Soulcem, rejoindre le port de Bouet (2509 m) en passant par l’étang de la Soucarrane. Nous sortons définitivement de la mer de nuages deux cents mètres sous l’étang à côté duquel des pêcheurs ont bivouaqué. Quand nous passons, l’un d’entre eux est d’ailleurs en train de sortir une énorme prise ! Au col, le sauvage versant espagnol se dévoile et la ligne de crête prévue ainsi que la brèche de Gerri paraissent bien loin. Nous suivons une sente cairnée qui passe sous le pic de la Soucarrane jusqu’à arriver en face de la coma de l’Orri où nous descendons à vue vers le fond du vallon. Parsemé d’étonnantes pierres blanches, le torrent est magnifique. La montée de la coma de l’Orri est agréable et rapide sauf le pierrier précédant la brèche (2693 m), raide et croulant. C’est un vallon très sauvage et certainement peu fréquenté : quelques cairns sur le bas puis plus rien. Nous y délogeons des lagopèdes (les premiers d’une longue série d’une quinzaine d’individus) et y croisons des hardes d’isards. De la brèche, nous faisons un aller-retour au pic de Gerri (2860 m) en suivant d’abord la pente herbeuse au S puis en rejoignant la crête. Le Monteixo ne paraît pas si loin mais ce sera pour une prochaine fois.
De retour à la brèche, nous récupérons les sacs et filons dans le sens opposé vers le pic de Palomer (2829 m) où la longue crête se dévoile intégralement. Cette dernière ne présente pas de difficultés mais nécessite parfois un pied sûr lorsqu’il faut traverser les pentes herbeuses pour absorber les oscillations de la crête et gagner ainsi un peu de temps. Le pic d’Escorbes (2789 m) marque le changement de direction vers le SE. Nous passons à l’insignifiant pic de Vallpeguera (2743 m) puis attaquons le pierrier sommital du bicéphal pic de Sanfonts (2889 m). Belle vue sur le secteur avec les estanys de Baiau et le refuge Josep M. Montfort (non gardé) en contrebas. L’accès par l’O à l’agulla de Baiau (2860 m) est facile mais la crête E ne passe pas. Pour en descendre, emprunter les raides pentes au S pour rejoindre la sente balisée en rose/rouge qui contourne le sommet et mène à la portella de Baiau (2757 m).
Initialement, j’avais en tête de bivouaquer aux estanys de Baiau et monter au sommet de la Coma Pedrosa très tôt le lendemain matin mais un emplacement de bivouac et un petit filet d’eau dans le vallon de l’estany Negre nous permettent de rester là. Point positif : il n’y aura que 150 mètres à monter le lendemain matin. Nous installons nos affaires et lézardons avant de faire chauffer de l’eau, préparer le repas et monter au pic de Baiau (2885 m) pour le coucher du soleil. En haut de la Coma Pedrosa, j’aperçois la silhouette de Pierre, appareil photo en main, qui doit également se délecter de ces ambiances. Les minutes passent, les couleurs changent et la lumière décline pour ces instants où tout semble suspendu.
Jour 2
Comme d’habitude, j’ai passé la nuit à compter le nombre d’heures me séparant du réveil plutôt qu’à dormir. Après avoir rangé les affaires, nous partons en direction de la Coma Pedrosa (2942 m) où nous rencontrons Pierre qui a passé une nuit plutôt agitée à cause du vent. Tandis que nous discutons, le soleil se lève et découpe les crêtes andorranes et ariégeoises. Petit à petit, les gens affluent au sommet, point culminant de la Skyrace Coma Pedrosa dont le départ est donné à 8h30. Le parcours passe d’abord par le pic de les Fonts avant de remonter à la Coma Pedrosa et de descendre à Arinsal. Vers 10h30, l’agitation monte et les premiers coureurs arrivent avec l’impressionnant Kilian Jornet en tête de file qui gagnera l’épreuve (21 km – 2300D+) en 2h33 ! Nicolas et Alexandre ne sont pas en reste et passent autour de la 50e place et finissent avec un super chrono. Il est temps pour nous de quitter le sommet puisqu’un long retour nous attend.
Nous montons à nouveau au pic de Baiau (2885 m) pour suivre la crête jusqu’à la roca Entravessada (2929 m). Le début est facile puis la crête devient soudainement découpée : les nombreux pas de II (quelques pas de III également, plus rares) se succèdent sur le fil et de part d’autre dans une ambiance souvent aérienne en dépit des échappatoires fréquents vers les estanys de Baiau. Nous doublons un couple qui n’avance pas vite car la fille n’est vraiment pas rassurée. De vieilles marques oranges indiquent les passages de moindre résistance même s’il y a souvent plusieurs options possibles. Un dernier ressaut mène juste sous le sommet où les difficultés cessent. La crête peut se parcourir dans les deux sens à difficulté égale. La descente jusqu’au collada dels Estanys Forcats (2742 m) nécessite de suivre la crête vers le N (quelques cairns) faite d’immenses dalles sur le haut qu’on évite parfois sur la gauche. Les estanys Forcats, nichés entre ces hardis sommets, sont encore partiellement gelés.
Un astucieux itinéraire cairné remonte la face S du pic de Médécourbe et débouche directement au cairn sommital. L’ambiance y est moins glauque que lors de ma première visite ! Nous poursuivons vers le pic oriental sur la crête effilée mais facile où les rochers acérés ralentissent la progression. Pour descendre au port de Médécourbe (2750 m), rejoindre la brèche située juste sous le sommet oriental et s’engager dans le couloir raide (cairns) jusqu’au col. Si elles ne connaissent pas cet itinéraire, les deux personnes au sommet du pic des Lavans doivent bien se demander ce que nous faisons là. Pour monter au pic des Lavans (2896 m), nous laissons les sacs au col et remontons la pente herbeuse jusqu’aux premiers rochers. La voie normale cairnée remonte ensuite un couloir rocheux facile où il faut poser les mains. En arrivant au sommet, sacrée surprise, nous rencontrons l’oncle de Lucille et son amie qui sont venus du port de Bouet. Le pic des Lavans ne doit pas être beaucoup fréquenté et y rencontrer des connaissances est vraiment improbable ! De retour au port de Médécourbe, ne reste plus que le long retour : la descente vers l’étang de Médécourbe est infâme : raide et croulante au début, puis un long et austère chaos de blocs (heureusement qu’il restait quelques névés), puis à nouveau de la pierraille avant une raide pente de gispet puis re-blocs et l’étang. Un sentier balisé en jaune ramène ensuite sur le plateau.