Que dire ? Une journée fabuleuse sur les crêtes de la sierra de Partacua, petit massif qui illustre toute la diversité et la beauté des Pyrénées. La verticalité des versants nord contraste avec les pentes plus douces des versants sud.
Date : 2022/09/21
Distance totale Distance et dénivelé indicatifs. Privilégier ces valeurs plutôt que celles indiquées le profil. : 33 km
Dénivelé positif : 2700 m
Temps de montée Pauses classiques incluses (photo, discussion, collation, manips à ski...) au contraire des longues interruptions (sommet, refuge, sieste...) : 3h15 pour la peña Telera puis 3h30 jusqu’à la pala de los Rayos.
Temps de descente : 2h15
Conditions et commentaires : beau.
Difficultés : de tout : hors-sentier, pentes raides, lecture, petite escalade, crête aérienne…
Accès : parc animalier de Piedrafita de Jaca
Itinéraire Profil visible en cliquant en bas à gauche de la carte. Privilégier les valeurs ci-dessus plutôt que celles indiquées sur le profil. : GPX
Après une bonne douche et une grosse sieste, c’est avec un grand plaisir que je me lance dans le récit de cette journée, déjà nostalgique de cette superbe découverte qui offre une vue extraordinaire tout au long de la progression. En pleine semaine, j’ai aperçu la première personne de la journée après 8h de marche, une fois de retour sur la longue piste descendant au parc animalier. Je craignais d’avoir les jambes lourdes après avoir été en montagne les deux jours précédents mais en définitive, les sensations furent correctes. Globalement, la traversée est plutôt facile techniquement mais présente quelques passages délicats obligatoires qui viennent rythmer les longues portions de marche.
Depuis le parking du parc animalier de Piedrafita de Jaca (mais où sont les animaux ?), je redescends un peu sur la route pour emprunter la piste qui passe derrière le long hangar à moitié désaffecté. Au bout d’une dizaine de minutes, je quitte la piste au niveau d’un cairn pour suivre un sentier bien marqué qui tournicote au milieu de la végétation. Une fois sur les pelouses, la peña Blanca est désormais bien visible avec, à gauche, le couloir del Burro (« du mulet » ndlr) qu’il va falloir emprunter. Les premiers rayons du soleil viennent éclairer les parois vertigineuses de la peña Telera. Je trouve l’excellent chemin qui relie le lac de Piedrafita à l’arche de Sarronal. Après l’avoir suivi quelques instants, lorsqu’il monte dans un bosquet de pins, je le quitte pour traverser un pierrier facile (quelques cairns) et me diriger vers le couloir. Ce dernier se remonte facilement en restant majoritairement dans le gispet au milieu. Il y a même quelques cairns et parfois une petite sente qui commence à se former. Évidemment, je dérange quelques isards dont 3 individus qui passent à moins de 10 mètres derrière moi comme s’ils avaient attendu patiemment que je passe. Pour sortir sur la crête, il ne faut pas franchir l’imposant verrou mais suivre la sente cairnée qui part vers le sud. Comme la veille à la peña Sabocos, découverte soudaine de la plaine espagnole toute proche.
La montée à la peña Blanca se déroule finalement assez loin du fil de la crête. Même s’il est possible de le suivre au début, il faut ensuite se déporter dans le versant S quand le sommet commence à être visible. Sur la crête au S du sommet se trouve une arche magnifique comme il en existe quelques unes dans le secteur. Une sente bien marquée coupe le versant S jusqu’à l’aplomb du sommet. Il faut ensuite repartir brièvement en sens inverse pour rejoindre la crête puis le sommet en posant un peu les mains. Belle vue au loin avec les lumières matinales et perspectives plongeantes impressionnantes le long des lignes de fuite des falaises. D’ici, la peña Telera me semble loin alors je n’ose pas imaginé les sommets à la fin de la sierra de Partacua où je suis censé passé à la fin de mon périple. Sans revenir sur mes pas, je descends dans un couloir facile versant SO juste sous le sommet jusqu’à une terrasse herbeuse. Puis, il faut descendre un deuxième couloir plus raide (repéré ici) juste à la droite du premier dans lequel je prends garde au rocher malgré de bons blocs compacts qui rendent la descente accessible (quelques pas de II). Sur du terrain désormais plus facile, je peux alors longer tranquillement jusqu’au très beau collado de Cabachirizas (2361 m) où débouche la voie normale de la peña Telera depuis le lac de Piedrafita.
Au lieu d’emprunter la vire qui part à droite (« el Paso Horizontal ») pour aboutir dans la cuvette entre la peña Zarambucho et la peña Telera, je préfère monter directement à la peña Zarambucho pour éviter d’y faire un aller-retour. Pour cela, je pars vers le SO sur la sente qui longe les falaises dignes de la pointe Bazillac à côté de la brèche de Roland. Lorsque les falaises deviennent moins sévères, plusieurs cairns indiquent un passage pour franchir l’imposante barre rocheuse calcaire. Une montée en diagonale peu difficile (II) mais exposée sur un rocher pas toujours fiable me permet d’arriver au-dessus de cette barre rocheuse. Après deux ou trois cairns au début, je n’ai plus rien vu ensuite, y compris à la sortie. Suis-je passé au bon endroit ? Si oui, le passage ne doit pas être facile à trouver en arrivant d’en haut. La montée jusqu’à la peña Zarambucho est raide et éprouvante. Après un passage plus raide dans du terrain mêlant gispet et solides rochers ocres, je débouche sur des pentes calcaires plus douces menant facilement au sommet. Sur ma lancée, je descends dans la cuvette puis remonte sur la droite en direction de la peña Telera, sa borne géodésique et… son troupeau de chèvres. Sans surprise, la vue est étendue et sublime.
Pour descendre de la peña Telera, mieux vaut rester le plus proche possible de fil afin de passer facilement la petite barre peu après le sommet. Ensuite, j’enchaîne toutes les éminences sur du terrain parfois un peu raide mais toujours facile. Je rejoins la punta Plana et ses 1000 mètres de vide au nord qui font froid dans le dos : sous la cime, la paroi est presque surplombante et n’est même pas visible. Vers l’ouest, les innombrables falaises s’étirent jusqu’à la peña Retona. Après avoir rejoint le large col au S du sommet, je laisse mes affaires et fais un aller-retour au petit trot jusqu’au pico Retona avant de rejoindre en coupant au maximum le large col (2468 m), point le plus bas de la traversée après le collado de Cabachirizas. Une bonne sente monte ensuite longuement au pico de la Pala et son sommet dont la couleur calcaire dénote et illustre le changement géologique qui s’opère à cet endroit. En louvoyant entre les bosses du vaste plateau calcaire, je monte sans problème à la peña Puerto Rico. La descente au col suivant (2603 m) où débouche le canal Ancha est raide mais facile également. À cet instant, je dis au revoir aux quelques touffes de gispet que je ne vais plus voir pendant un long moment. En effet, la peña Retona est beaucoup plus minérale : du col, il faut partir un peu vers le S dans du mauvais terrain croulant pour éviter le fil de la crête avant de revenir au N en suivant les quelques cairns qui amènent à la courte cheminée menant au sommet. De la peña Retona, la peña Puerto Rico a vraiment fière allure tandis que le panorama est toujours immense de la Collarada au Cotiella.
La pala de los Rayos, dernier sommet de la traversée, semble tout proche mais le rejoindre n’est pas de tout repos. Pour cela, je décide de suivre le cheminement de Philippe Quéinnec qui permet, via un large détour, d’aller au puerto Pobre en évitant les falaises infranchissables qui soutiennent la peña Retona. Je reviens brièvement sur mes pas jusque sous la cheminée puis longe la paroi sur une terrasse confortable jusqu’à une petite brèche. Ensuite, il faut suivre l’étroite crête jusqu’à la peña Blanca. La crête n’est pas difficile mais demande de poser un peu les mains sur du rocher parfois fragile. Surtout, elle est assez exposée tout le long voire vertigineuse à certains endroits. Après plusieurs heures de marche, il faut rester concentré. En parallèle de quelques isards, je descends plein O dans des éboulis faciles. Puis, il faut partir plein N pour traverser une longue une pente d’éboulis raide et peu rassurante. Après quelques mètres, au regard de la purge monumentale qui s’annonce, je préfère descendre jusqu’à la dernière banquette surplombant les barres rocheuses, mêlant rochers gris et ocres. Moins raide, elle me permet d’avancer plus facilement et de passer les différents entonnoirs sans problème. Après avoir passé ce que je croyais être le dernier entonnoir, je découvre que le puerto Pobre est encore défendu par des pentes d’éboulis. Or, à mon niveau, la traversée me semble désormais trop raide et exposée. Je remonte alors difficilement une centaine de mètres pour retrouver les éboulis gris et traverse en ascendance en me rapprochant progressivement des falaises et en essayant de profiter au maximum des blocs coincés ici et là. De ce perchoir austère, la descente jusqu’au puerto Pobre demande du flair car les deux cheminées (quelques pas de II en rocher peu sûr) ne sont pas indiquées par des cairns. La première est encaissée et en rocher calcaire. Elle me dépose sur une terrasse croulante et inconfortable que je longe un court instant pour désescalader une deuxième cheminée en rocher ocre. Ouf ! Mais alors un grand ouf car depuis la peña Retona, entre la crête aérienne, la traversée absolument infâme dans les éboulis puis les quelques hésitations sur les cheminées à descendre, je suis content d’être enfin au col.
Contrairement aux apparences, la montée à la pala de los Rayos est facile. La vue est saissante sur la peña Retona qui, d’ici, ressemble à un imprenable bastion. Vers l’O, l’élégante Collarada et son capuchon semble à portée de main. Pour descendre vers le lac de Bucuesa, je continue sur la crête vers l’O, ou plutôt sur les vires du versant N qui me ramènent sur le fil au-dessus d’un ressaut qui s’évite aussi par le N en désescaladant au mieux une courte dalle. Puis, un peu plus bas, dès que c’est possible, je descends vers le S dans une pente raide de gispet et de cailloux avant de longer l’ensemble du versant pour rejoindre les pelouses au nord de l’ibon de Bucuesa. L’entrée du canal del Plan se situe au point le plus bas surplombant les falaises. Elle est impossible à louper car marquée de plusieurs cairns et de gros points de peinture rouge. Le balisage est abondant dans la descente du couloir fait de grandes marches puis d’un rétrecissement un peu croulant. Enfin, je prends pied sur la sente bien marquée dans la pierraille pour rejoindre les pelouses menant à la piste, sans sentier bien défini. Avec le canal del Plan puis la longue descente au pied des falaises des sommets parcourus d’où les yeux ne peuvent se décrocher, j’ai l’impression que le massif me retient par le bras en continuant à dévoiler ses charmes. La piste est bien longue jusqu’au parking, heureusement que la jolie vue vers la Tendeñera est dégagée, y compris lorsque les pins font leur apparition.